Si l'Égypte soutient les habitants de Gaza, elle devrait leur offrir des logements temporaires
Alors qu'Israël intensifie sa lutte contre le Hamas à Gaza, la vie va devenir de plus en plus intolérable pour les civils palestiniens innocents de la bande de Gaza. Le moment est venu pour l'Égypte, ainsi que pour l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, de joindre l'acte à la parole en ce qui concerne la prise en charge des habitants de Gaza.
Le gouvernement égyptien devrait permettre à ces civils déplacés de quitter Gaza et de s'installer dans des logements temporaires dans le nord du Sinaï. Les deux riches États du Golfe devraient payer pour eux. En échange, Israël pourrait s'engager à permettre aux Palestiniens de retourner à Gaza une fois que les forces de défense israéliennes auront détruit le Hamas.
L'Égypte ne s'est pas montrée réceptive à l'idée d'accueillir des civils palestiniens déplacés. Le président Abdel Fatah el-Sisi a prévenu qu'en autorisant les civils palestiniens à entrer en Égypte, on ouvrirait la porte aux militants pour qu'ils lancent de nouvelles attaques contre l'État juif depuis le Sinaï. C'est pourquoi, dès le début des frappes aériennes israéliennes sur la bande de Gaza, des camions égyptiens transportant de l'aide humanitaire ont été déployés à la frontière de Gaza, les forces de sécurité ont intensifié leur présence et l'institution Al-Azhar, ainsi que les médias pro-étatiques, ont appelé les Palestiniens à ne pas quitter Gaza, arguant du fait qu'ils ne pourraient pas y revenir.
Dans une tentative de riposte à ces déclarations, l'ambassadrice d'Israël au Caire, Amira Oron, a nié qu'Israël ait l'intention de réinstaller des Palestiniens dans le Sinaï.
Entre-temps, la rhétorique pleine d'espoir émanant du Caire ne peut être ni négligée ni rejetée. Le président Sisi a exprimé son vif intérêt pour le maintien du traité de paix avec Israël. Lorsqu'une cible égyptienne a été touchée à la suite d'une erreur israélienne, au lieu d'exprimer son indignation, le porte-parole militaire égyptien a publié une déclaration équilibrée exprimant sa compréhension.
En outre, d'anciens généraux de l'armée ont parcouru les médias locaux pour expliquer au public qu'une guerre avec Israël n'était pas dans l'intérêt de la sécurité nationale égyptienne.
Le moment n'est-il pas venu pour le Caire et les États sunnites modérés de rendre la monnaie de sa pièce à Israël ? Au cours de la dernière décennie, Jérusalem et l'Égypte ont collaboré pour lutter contre le terrorisme dans la péninsule du Sinaï. Le niveau de confiance a atteint son apogée lorsque Le Caire a approuvé les frappes aériennes israéliennes contre des cibles terroristes à l'intérieur du territoire égyptien, et que Jérusalem a permis à l'Égypte de stationner davantage de troupes et d'armes.
De même, Israël a aidé les États arabes dans les capitales occidentales en prêchant en leur nom contre le danger que représentent les islamistes politiques à l'échelle mondiale - sans parler du solide partage de renseignements développé ces dernières années concernant l'Iran et des échanges économiques bilatéraux sur des plateformes de sécurité sophistiquées pour se prémunir contre les cyber-attaques et les attaques physiques.
Il n'y a donc aucune raison pour que les Égyptiens se méfient ou, plus généralement, doutent des intentions d'Israël à l'égard des habitants de Gaza. Le gouvernement israélien actuel ne souhaite pas annexer la bande de Gaza. L'offensive terrestre menée actuellement par les forces de défense israéliennes n'est qu'une procédure chirurgicale visant à réajuster les calculs dans la bande de Gaza afin de renforcer la sécurité d'Israël de son côté de la frontière et de relancer éventuellement la solution des deux États.
Le Caire a accueilli le Fatah et le Hamas en juillet et, comme d'habitude, les tentatives d'unité ont échoué. Par conséquent, soutenir les efforts actuels d'Israël pour éradiquer le Hamas devrait permettre d'atteindre deux objectifs : premièrement, il affaiblira le Hamas, dont la proximité avec l'Iran, le Qatar et la Turquie a dilué le rôle de l'Égypte dans l'arène palestinienne. Deuxièmement, la guerre d'Israël contre le Hamas est en fait menée au nom de tous les États arabes modérés de la région. L'action d'Israël vise à mettre fin à la triple influence destructrice d'Ankara, de Doha (où les dirigeants du Hamas sont hébergés et financés) et de Téhéran (qui formerait des agents du Hamas).
La présence d'une entité stable et non terroriste dans la future bande de Gaza serait bénéfique à l'Égypte sur plusieurs fronts : elle améliorerait la situation sécuritaire de l'Égypte et offrirait de nombreuses possibilités d'accroître les échanges commerciaux. Le Caire aurait tout à gagner à mettre fin au rôle du Hamas qui divise Gaza de la Cisjordanie. Si le blocus de Gaza était levé, les bénéfices économiques iraient directement à l'Égypte et pourraient même donner un coup de pouce à sa province du Sinaï en proie à des troubles.
Le moment est venu pour l'Égypte d'ouvrir sa frontière nord aux civils palestiniens qui fuient la guerre pour leur patrie. La menace que représentent les nouveaux arrivants pour la sécurité serait largement compensée par les avantages en termes de relations publiques internationales dont bénéficierait Le Caire en prenant une telle décision pour des raisons humanitaires. La pression exercée sur son allié secret, Israël, s'en trouverait allégée - et le gouvernement israélien lui en serait reconnaissant.
L'Égypte fera-t-elle un pas en avant ? Elle le devrait.
Haisam Hassanein est chercheur associé au FDD, où il analyse les relations d'Israël avec le monde arabe et musulman. Ses écrits ont été publiés dans le Wall Street Journal, Foreign Affairs, New Daily News et bien d'autres.